Saphô / Σαπφώ (vers 1630 - vers 1580 av. J.C.) : Nocturnes
Nocturnes
Etoile du soir, ô toi qui ramènes
Ce qu’a dispersé le clair jour naissant,
Voici que chèvre et brebis tu ramènes,
Et à la mère son enfant.
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L’eau fraîche murmure à l’entour,
Parmi les pommiers parfumés,
Et des feuilles où le vent court,
Le sommeil pour nous a glissé.
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Les étoiles, autour de la splendeur lunaire,
Cachent à nouveau leur clarté
Lorsque d’un vif éclat elle revient briller,
En son plein, au-dessus de l’ombre de la Terre.
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La lune s’est couchée,
Les Pléiades aussi.
Il est minuit, l’heure est passée,
Je suis seule étendue ici.
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Le rossignol charmeur annonce le printemps.
Je dis que l’avenir se souviendra de nous.
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Je désire et je brûle.
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A nouveau l’Amour, le briseur de membres,
Me tourmente, doux et amer.
Il est insaisissable, il rampe
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A nouveau l’Amour a mon cœur battu,
Pareil au vent qui, des hauteurs,
Sur les chênes s’est abattu.
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Tu es venue, tu as bien fait :
J’avais envie de toi.
Dans mon cœur tu as allumé
Un feu qui flamboie.
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Je ne sais ce que je dois faire,
Et je sens deux âmes en moi.
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Je ne sais quel désir me garde possédée
De mourir, et de voir les rives
Des lotus, dessous la rosée.
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Et moi, tu m’as oubliée.
Telle la pomme savoureuse,
Rouge au bout même de la branche,
Là-haut, sur la plus haute branche.
Ah ! les cueilleurs l’ont oubliée.
Non, ils ne l’ont pas oubliée,
Ils n’ont pas pu y arriver.
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Monte la lune dans son plein,
Les filles autour de l’autel...
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Ainsi jadis, d’un pied léger,
Dansaient les filles de la Crête,
Autour d’un autel bien-aimé,
La musique animant la fête,
Et du gazon elles foulaient
Les fleurs à la douceur si fraîche.
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Les poids chiches dorés poussaient sur le rivage.
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Le sommeil aux yeux noirs est venu sur leurs yeux.
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Est devenu froid le cœur des colombes,
Leurs ailes se sont repliées.
Traduit du grec par Robert Brasillach,
In « Anthologie de la poésie grecque »
Editions Stock, 1950
Voir aussi :
« Je t’ai possédée, ô fille de Kuprôs ! » (22/02/2017)
Aphrodite / εἰς Ἀφροδίτην (30/03/2017)
A une aimée (10/05/2017)
« Et je ne reverrai jamais... » (13/05/20)
« ... Rien n’est plus beau... » (13/05/2021)
Je serai toujours vierge (27/06/21)
« Je ne change point... » 19/05/2022)
Ode à Aphrodite (17/05/2023)
Confidences (16/05/2024)