Heather Dohollau (1925 – 2013) : Les larmes de Carthage
Les larmes de Carthage
LE PLAT DE LA MERE
A table devant la mer
Mangeant des yeux
Au bord des rêves
Sur l’étroit balcon
Où tourne un vertige
L’incertain miroir
D’un ciel sans reste
Assiette offrande
Nourrir du vide le jour
Avant le partage fleur
Du plat de la mère
Celle dont la vie
S’en va au loin du proche
Dans la chambre claire
MORNING-GLORY
Oliviers et figuiers de Barbarie
Sur une terre plate jusqu’au mur de la mer
Main levée de Dieu dans une soie de silence
Dieu de volubilis gloire du matin et du soir
Regards enlacés de retour vers le rivage aimé
Rires clairs et écume immortelle
CIMETIERE MARIN
Blancheur de mort
Pierres levées à la tête
Et aux pieds des femmes
Qui ont donné suite
Dans cette presqu’île
Où la porte de la mer
Est son entrée
Là où nous sommes
Parmi les chardons musiciens
Et les os de la lumière
Entourés de rochers porte-noms
PLACE DU CAIRE
Une petite place
A l’ombre des arbres
Qui tressent au ciel
Un toit murmurant
Pour les oiseaux prophètes
Sur un sol de silence
Le temps passe
Et les doigts discernent
A l’abri des mots
Une rondeur de l’instant
LA BARQUE DES OISEAUX
Jamais à l’ancre
Sous la falaise des mots
Entre montée et chute
Vers le bleu d’en bas
Et un ciel qui se penche
Par delà les arbres
Icare perpétuel
La tête dans l’eau
Et les pieds qui brûlent
D’une mémoire du soleil
Reste le filet sauveur
Du chant des oiseaux
La présence ailée
D’un souffle suspendu
Et les voiles levées de lumière
Pour maintenir le cap
Sur une étoile absente
LES LARMES DE CARTHAGE
Perles noires de feux éteints
- Le verre des bagues
Trouvées sur cette plage de longue mémoire
Et là où elles s’enroulent comme chat qui dort
- Noirceur qui porte bonheur
Tremblait une larme
LA ROSE DES VENTS
En anglais disait le guide : a wind flower
Et je voyais une frêle anémone des bois
Au lieu de ce tracé dans la pierre du sol
D’une rose des vents aux pétales aigus de distance
De flèches venant de loin vers la cible immobile
D’un rien vide de la poussière de tout
SIDI BOU SAÏD
Les ruelles d’un labyrinthe de clarté
Une prière blanche et bleue
Qui monte et descend
Pr les portes scellées
Les entrées en chicane
Comme la voix du muezzin
Vers le centre caché
Et partout des fleurs
En miroir d’une source
Sur les pentes de l’air
La terre âgée.
Editions Folle Avoine,35023Bédée 1996
Voir aussi :
« Matière de lumière les murs… » (14/01/2017)
« Si pour vivre il suffit de toucher la terre… » (11/02/2017)
La terre âgée (21/03/2017)
L’après-midi à Bréhat (28/04/2017)
Mère bleue (05/03/2018)
L’ombre au soleil (05/03/19)
Le tertre blanc (05/03/20)
Paulina à Orta (05/03/2021)
Lieux (06/03/2022)
Fleurs 05/03/2023)