Jennifer Clement (1960 - ) : Voyageurs
Voyageurs
pour le capitaine George N. Sibley
Nous avons besoin du paysage inconnu
où la lune est une proie
chassée comme un jaguar, un ours, un écureuil,
et la nuit est trouée d’une flèche empoisonnée
noire de curare.
Les chants résonnent comme la pluie,
les poissons nagent dans l’air
et les comètes,
comètes à queues de mercure,
déchirent le ciel,
éparpillant pierres de lune, cendres argentées
et la plainte d’un million
d’ailes d’insectes. Nous sommes
rempli d’un désir opalescent,
perpétuellement en mouvement
vers la prochaine pincée
de fleur de sel,
le prochain toucher étrange
de l’ivoire, de la perle noire et d’un hippocampe
parfaitement fossilisé
allongé dans nos paumes.
Perpétuellement en mouvement,
nous partageons
l’âme de l’acrobate
qui, comme toutes les étoiles,
cherche la chute.
Traduit de l’anglais par Marie Evangéline Arsenault
In, «l’Inconnu et le marin de Newton »,
Editions Ecrits des Forges (Québec), 2001
Voir aussi :
Tiens ma robe (10/02/2017)
Pour une jumelle qui n’a jamais eu de robe de soie (02/05/2017)