Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Femmes en Poésie
8 novembre 2024

Edith Azam (1973 -) : Bestiole-moi Pupille (2)

 

Bestiole-moi Pupille

 

.................................................................

Mi-voix.

Il lui dirait

des mots d’amour...

Les dit

les répètera plusieurs froids.

Pupille reste :

muette

et ça la dénude.

Ensuite après

tous deux l’un l’autre

quelques gestes

comme une danse avec le mains

pour caresser leur ombre

et tracer

le chemin.

 

 

Pupille lascive se laisse aller.

Tout lentement approche

s’enroule dans un creux.

Elle se parle ça sanglote

elle sanglote ça musique

c’est langoureux

L’écriture bestiole :

c’est éminemment langoureux.

 

 

Les choses ne sont pas si simples.

Six heures matin

les images reviennent :

le Fou qui mange Deuxième Homme

Deuxième Homme avalant le Fou

tout se mélange

ça va vite.

L’Homme Bestiole dévore Pupille

Le Deuxième en Fou

creuse partout

Troisième cinquième cent mille Bestioles :

Pupille tombe à terre

plante regard dans cavités :

rien à faire

les mandibules creusent.

La vie ne s’existe qu’à peine

et puis se loupe un peu beaucoup.

 

 

Le Deuxième Homme a disparu.

L’autre

le Fou

gratte ses ongles sur le mur

chante son rire de crécelle

Pupille tremble et dans ses os

Entre six-sept petit matin

tout :

s’effondre.

La lumière est trop froide

il n’y a que la respiration

toujours étroite

du silence.

Pupille se blottit la tête

se maintient dans ses mains

solide :

solitaire.

 

 

Après un temps aussi

le Fou cesse son chant

le Fou approche lentement

Dans sa tête Pupille

c’est tout çà qu’elle entend :

les pieds sur le plancher

les craquellements :

d’ossature.

Et reconnaît Bestiole

qui reprend sa grignote.

Le Fou s’arrête tout près d’elle

et leur violence contenue

a quelque chose d’indécent.

Puis Bestiole repart dans un trou

et les mâchoires ouvertes

patiente en salivant.

 

 

Le Fou reprend son chant crécelle

et tourne et tourne

et très longtemps

tout autour de Pupille.

Pupille se maintient

se parle dans sa tête

ne cède pas se parle

continue des paroles

qui n’existent même pas

se parle se fait voix...

Ne cède pas Pupille

s’invente se traverse

s’écriture dans souffle

va rejoindre Bestiole

au creux des cavités :

et fouille tout son air.

 

 

Le Deuxième Homme bouquet final

et tout pour faire grand spectacle.

Pupille avance sort d’elle-même

offre ce qu’elle ne connaît pas.

Les mains la peau :

c’est à rêver.

L’abandon pour l’éternité :

il n’y a pas d’autres endroits pour vivre.

La jouissance ?

C’est d’abord c’est toujours

une histoire de chute

c’est dans un appel d’air.

Le Deuxième Homme

bouquet final :

a pris le Fou sur ses épaules.

 

 

Pupille impuissante

voudrait tout simplement

un peu

voudrait s’exister l’autre.

S’arrache quelques mots

mais çà ne suffit pas :

rupture

Les fleurs étendues sur le lit ?

Des armes blanches

couchées malades.

En manque d’air Pupille

se crève en profondeur

dans une respiration

brutale

qui lui cloue :

le langage.

 

 

Pupille dessaisie.

Pupille fragmentée :

se perd.

Pupille le langage

ne sait même plus pourquoi.

La parole impossible

ça l’aura fait crever.

Silence plein la bouche

Pupille pense :

écrire

est une léprosité :

mentale

 

 

Pupille avance dans sa nuit

et ne sait plus très bien

qui elle est dans sa peau.

Des béances partout :

le langage figé lui craque les poumons.

Dans sa tête Pupille :

les mots se disloquent.

Devant elle le Fou

danse fiévreux

tout en boitant

dans les regards de...

Deuxième Homme.

 

 

Deuxième Homme :

le Fou lui déboîte le crâne

y recherche Bestiole

puis fatal

Deuxième en Fou

s’attaque à craquer Pupille.

Elle ne bouge pas

se replace en bestiole

s’enfonce dans un creux :

disparaître.

 

 

Pupille l’impossible

ça la fouille partout.

Hors de :

plus qu’elle-même.

Et tout va vite

très très vite.

S’éloigne de tout

Pupille

s’éloigne d’absolument tout

et coupe tous les liens.

Seule dans sa tête Bestiole

s’appuie sur le néant

pour retrouver le souffle.

.................................................................

 

 

Bestiole-moi Pupille

Editions la tête à l’envers 58330 Crux la Ville, 2020

Voir aussi :

Tout Tom tout seul (26/05/2022)

Bestiole-moi Pupille (1) (05/11/2023)

Commentaires
Femmes en Poésie
Archives