Déwé Gorodey (1949 - 2022) : Nuits taboues
Nuits taboues
à toi, sorcier ou devin de la tribu
Nuits floues
Noir tabou
Vol dans le sommeil
Dieu rouge qui se lève
Morts
Feu et sagaies
dans les nuits floues
Quand le feu s’endort sur sa natte de cendre le clan se réfugie dans le noir
le pilou de la flamme d’angoisse commence sur la cime
de l’araucaria envoûté par la puissance magique de puissance du doki
La Parole des Anciens s’est tue
et la Pensée du fils de la tribu
s’égare sur les chemins qui mènent au tertre
quand là-haut le bambou est rythme des feux follets
Ainsi mourra le clan du chef aux palabres douces à l’oreille du sorcier rouge
qui hante la case ou proies et victimes nourrissent la vie
de ce dieu tabou dont il est le serviteur depuis le don hérité
les nuits sans Parole et Pensée
où le feu consume le fils de la Terre
où les sorciers guerriers et chefs sentent venir la mort
par les cris du vent dans les palmes des cocotiers
Je m’évaderai dans la nudité vieille telle la Terre où je ne suis plus
Prenez-moi prenez-moi bambous sur l’araucaria
Que je sois flamme dansante tourbillonnante au-dessus des eaux
jusqu’à l’aurore
dernière de ce fils de la Terre
qui n’est plus moi quand l’unique magie tient
tout ce que je suis dans ses mains qi me déchirent
le corps l’âme la vie pour vous Tabou et Doki
Maux vagues
de la nuit
Secrets dévoilés
vus
par l’œil qui veille
Dans les maux vagues
(Montpellier, 8 Février 1972)
Revue « Poésie 1, N° 116, Mars-Avril 1984 »
Le Cherche-Midi éditeur, 1984
Voir aussi :
Fille perdue (25/10/2017)
Et les prospectus (25/10/2018)
Nuits nues (25/10/2019)
Nuits blanches (22/10/2020)