Gilberte H. Dallas (1918 - 1960) : « Les ancolies d’ébène... »
Y
Les ancolies d’ébène guettent la mourante
dévorée par la pluie
Les rues la serrent
l’enlacent
Elle marche dans la jungle de béton
Elle tend son corps comme une phrase délavée.
Elle titube celle qui aurait pu être ma mère
Elle titube la mère qui n’a pas de ventre,
En sa place mes yeux agrandis,
Deux yeux immenses deux glands desséchés
Greffe de la mort
Pauvre mère stérile berce dans ta chair
Mes yeux d’enfant perdu
Mes yeux comme une herbe qui mâche l’épouvante
Mes yeux d’extra lucide
Pauvre loque de sel !
Mes yeux de boue et de lumière
Et toi tu marches, tu marches dévorée de pluie,
et me cherches,
Moi qui suis là, incrustée en toi.
Alphabets de Soleils
Editions Seghers, 1952
Voir aussi :
« Des soleils noirs… » (19/04/2017)
« J’ai plongé mon avide soif… » (12/01/2018)
A Vincent Van Gogh (12/01/2020)
« La bannière de mon corps... » (12/01/2021)
« Je vois au creux des paumes... » (12/01/2022)