Esther Tellermann (1947 -) : Trois sud (1)
Trois sud
Qui pétrit la face
par le milieu ?
Reste mèche
afin que ne l’aveugle
le trou de la pierre
la faille
du serti ?
Je t’ai
sculptée
je t’ai
saisie et t’ai
tue ô
couchée près de la hache
afin que tu
étincelles
je t’ai
surmontée d’une perle
noire
fait rendre sa lumière
puis conduit à tâtons
dans la syllabe
je t’ai déposée dans l’anneau.
On t’avait donné
le nom d’une lueur
et tu fermais la mienne
prends-la
dis plus lentement
comme si
rien n’avait
crié rien n’avait
flétri rien
que le vent cisèle
...
J’ai vu j’ai vu
ils s’éveillaient
nous les prenions
dans nos mains
ils n'étaient
grains de sable
pour les hauts-fonds
ils n’étaient grains de sable
feuilles d’or qui sait
ils
étaient entourés de buissons
et chacun
tenu et séparé
on m’a dit
ils étaient épissure.
Et les premiers
et les derniers avec
des yeux de lune
les premiers et les derniers
cherchant l’angle
où ils se fragmentent
chaque fois plus
descendus.
Chaque fois plus
contre le jour lavés
et leur bouche plus grave
d’un même songe
Je t’aurai recouvert
en souffle
en feuilles d’or
tu ne serais pas autrement.
J’aurai attaché
ta soif
aussi noire
que pierre non sertie
t’aurais ouvert comme s’ils
n’avaient pas
tu
mais le vent cisèle.
Je t’ai
enroulée dans le jaune
murmurée
dans les doigts
j’ai saisi
toute pierre qui s’ouvre
pour la faille brisée
du milieu.
........................................................................
In, Revue « Moriturus, N° 5, Août 2005 »
Editions fissile, 09310 Les Cabannes
Voir aussi :
Allons plus bas (08/04/2023)