Louise Labé (1526 – 1566) : « Telle j’ai vu... »
Telle j’ai vu, qui avait en jeunesse
Blâmé Amour, après, en sa vieillesse,
Brûler d’ardeur et plaindre tendrement
L’âpre rigueur de son tardif tourment.
Alors de fard et eau (*) continuelle (*) eau de toilette
Elle essayait se faire venir belle,
Voulant chasser le ridé labourage
Que l’âge avait gravé sur son visage.
Sur son chef gris, elle avait empruntée
Quelque perruque, et assez mal entée (*) ; (*) fixée, placée
Et plus était à son gré bien fardée,
De son Ami moins était regardée,
Lequel, ailleurs, fuyant, n’en tenait compte,
Tant lui semblait laide, et avait grand honte
D’être aimé d’elle. Ainsi la pauvre vieille
Recevait bien pareille pour pareille :
De maints en vain un temps fut réclamée ;
Ores quelle aime, elle n’est point aimée.
Ainsi Amour prend son plaisir à faire
Que le veuil d’un soit à l’autre contraire.
Voir aussi :
« Baise m’encor, … » (16/01/2017)
« Je vis, je meurs… » (12/02/2017)
« Tant que mes yeux… » (24/04/2017)
« Ne reprenez, Dames… » (05/02/2018)
« Ô doux regards... » (03/02/2020)
Oh ! si j’étais en ce beau sein ravie (03/02/2021)
« Depuis qu’Amour cruel... » (03/02/2022)
« Je fuis la ville... » (03/02/2023)
« Claire Vénus... » 03/02/2024)