Maria Luisa Artecona de Thompson (1919 - 2003) : Temps de l’arbre / Tiempo del árbol
Temps de l’arbre
Ce n’était pas l’arbre.
Mais la brise, oui, et l’oiseau
et la prière de l’oiseau;
et la doctrine du fruit,
le rituel des papillons
jaunes.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais le campanile, oui, des corolles
et la terre pour la descente des fleurs
et la racine des pluies
et la broderie des ombres
et le bras vert dans la bruine.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais le nuage, oui, et le vent
et la voix, le corps et l’âme du vent
et les membres pour la soif de l’eau
et les entrailles pour le désir de soleil
et le chemin aux ailes transparentes.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais la lune, oui, et les arêtes
multiformes de sa lumière métallique
et la vie dans le pulpe du fruit
et l’instant des mains
et l’apaisement de certaine nostalgie.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais la tempête, oui, et le temps
et l’aube et le crépuscule
et le créateur du paysage
et le visible des choses terrestres
qui furent avant afin qu’il soit lui.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais l’exaltation , oui, de ce qui est petit
et le prodige de l’herbe à ses pieds
et les portes de l’aurore damassée
et la fin de l’obscurité ;
et peut-être l’intimité de l’étoile rose.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais le fait, oui, entre tant de faits
et l’attirance des souvenirs
et l’automne, l’hiver, l’été,
le calice de la sérénité
et les interstices inquiets du ciel.
Ce n’était pas l’arbre.
Mais la légende, oui, faite pour évoquer
la mémoire d’autres arbres
et de ce qui n’est pas en eux
pas en nous non plus
et doit remonter dans un temps immémorial.
La légende de l’arbre.
Ce n’est pas l’arbre.
Voilà tout.
C’est le temps immémorial.
Traduit de l’espagnol par Françoise Campo – Timal,
in Rubén Bareiro Saguier et Carlos Villagra Marsal « Poésie paraguayenne du XXe siècle »,
édition bilingue, Editions Patino, 1990
Tiempo del árbol
No era el árbol.
Pero la brisa, sí, y el ave
y la plegaria del ave;
y la doctrina del fruto
y el ritual de las mariposas
amarillas.
No era el árbol.
Pero el campanario, sí, de las corolas
y la tierra para el descenso de las flores
y la raíz de las lluvias
y el motivo de las sombras
y el brazo verde en la llovizna.
No era el árbol.
Pero la nube, sí, y el viento
y la voz, el cuerpo y el alma del viento
y los miembros para el ansia del agua
y las entrañas para el deseo del sol
y el camino de alas transparentes.
No era el árbol.
Pero la luna, sí, y las aristas
multiformes de su luz metálica
y la vida en la carne de la fruta
y el instante de las manos
y el sosiego de alguna nostalgia.
No era el árbol.
Pero la tempestad, sí, y el tiempo
y el alba y el crepúsculo
y el hacedor del paisaje
y lo visible de las cosas terrestres
que antes fueron para ser él.
No era el árbol.
Pero la exaltación, sí, de lo pequeño
y el prodigio de la hierba a sus pies
y las puertas de la aurora adamascada
y el fin de la oscuridad;
y tal vez la intimidad de la estrella rosada.
No era el árbol.
Pero el hecho, sí, entre tantos hechos
y la atracción de los recuerdos
y el otoño, el invierno y el estío
y el cáliz de la serenidad
y los inquietos intersticios del cielo.
No era el árbol.
Pero la leyenda, sí, para evocar
la memoria de otros árboles
y de lo que no está en ellos
y tampoco en nosotros
y ha de caer en tiempo inmemorial.
La leyenda del árbol.
No es el árbol.
Nada más.
Es el tiempo inmemorial.
El canto a oscuras, 1986