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Femmes en Poésie
7 mars 2017

Isabella Leardini (1978 - ) : La colocataire aux pieds nus /La coinquilina scalza

isabella_leardini_1_

 

La colocataire aux pieds nus

 

Et si ce n’était pas le froid du soir

qui nous pinçait les lèvres,

mais la marche qui reprend, se renouvelle

éveille un autre vent

et tous ceux en qui j’ai cru ?

Tu sais que je porte encore en moi l’envie

de m’en aller comme s’achève un film,

le soleil en plein visage, dans la musique qui monte,

et de laisser à vos cantons de sable

à vos allées de calme parfait

toute fureur.

*

Petite fille je claquais les portes…

Quand suis-je devenue la personne qui reste

assise, qui vide les étés

en contemplant la chambre depuis le balcon

et n’y pénètre que pour voir

si le dernier fantôme ne l’a pas désertée lui aussi ?

J’ai un nouveau chien qui dort près de moi,

mais les soirs interminables sont de retour

les portes qui claquent dans mon dos

sans que leur fracas ne provoque de secousse…

Il faut avoir la nature de la personne qui reste

pour savoir garder les yeux ouverts sur les adieux

qui durent plus longtemps quand on les fait seul.

*

Dans chaque course, chaque emportement de la vie

tu m’as manqué et tu me manques au long de ces années.

Lorsque je descends vers le bar des matins,

tous les matins semblables de l’hiver,

te chercher est comme un jeu pour espérer…

A chaque changement de saison, à chaque tournant

du regard et de l’âge, je ne t’ai jamais perdu…

Je te garde pour l’été, quand je monte

dans mes golfes d’ombre et m’en reviens

à la maison la nuit, jusqu’au moment de trouver

l’endroit exact où les roues

font se croiser tes chemins avec les miens,

car tant qu’il est encore possible de te rencontrer

le jour ne prend pas fin.

*

Une saison d’air

 

Je reste dans le désordre, l’été

revient avec ses matins solitaires.

Si tu m’avais perdue dans la rue

comme il arrive aux choses les plus importantes

quand par mégarde elles tombent d’une poche

ou pire encore quand on nous les vole,

c’eut été mieux que de t’appartenir encore

saine et sauve sur une étagère qui s’emplit

à mesure que s’accroît le monceau des heures.

Je bouge autour de toi comme la poussière

et tu ne m’as jamais entendu marcher.

*

C’est depuis toute la vie que je te regarde

comme ceux qui ne quittent plus l’eau

ou qui jouent à passer leurs doigts sur les flammes.

Tu es ce souvenir qui nous touche,

une sensation d’herbe sous les pieds,

le froid du sable dans les mains.

Ta voix ne s’éteint pas sous le vent

mais gagne tous les replis de l’ombre.

Chacun a sa propre star qui remplit de ciel…

Regarde juste devant toi, entre la pelouse et la lumière,

je suis la fan qui s’accroche à la barrière

pour ne pas tomber dans le vide des années.

*

Je suis la proie des jours à venir

des visages qui ne reviendront plus

chaque fois que le rire s’éteint.

Qu’en sera-t-il de nous… de tous les feux…

et de cette prière sous une pluie

si violente que les mains s’étreignent ? 

Puisse-t-elle fermer et ouvrir les fenêtres les étés les hivers

et toutes mes demeures, tous mes balcons…

Que mille soirs nous tombent dessus

comme au fil des années, l’un au fond de l’autre…

On meurt un peu pour donner force à la vie

si le temps doit devenir uni et compact

comme une pierre qui coule au fond.

*

Toutes mes années qui se ressemblent

je les aligne dans les cours et sur les balcons

comme à la fin de l’après-midi des jouets

qui restent là pour chavirer dans la nuit

puis passent des matinées entières à sécher

et perdent peu à peu leurs couleurs.

Chaque fois que je m’arrête j’établis ma demeure

et dans chaque maison je façonne une cour

avec ce qui reste des choses à l’abandon.

Mais peut-être n’est-il pas possible de vivre

qu’en l’un ou l’autre de ces états inapaisés,

celui qui habite toute chose et celui qui passe

depuis toujours, celui qui ressemble au vent et celui qui

   tient le rôle du mur.

*

Celui qui laisse passer le temps d’être heureux

se prive en premier lieu des rires

qui coupent le souffle, puis quelqu’un

descend dans son regard et le brunit

comme les couverts en argent dans les tiroirs.

Toujours le même âge le même jour…

Celui qui laisse passer le temps d’être heureux

ressemble à une maison de vacances

qui se prépare à vivre et à s’emplir,

sa façade enclose tout entière dans un éclair

qui jamais ne s’exauce en orage.

*

Le chien qui à mes pieds regarde l’aube

se repaît de ma chaleur et ferme les yeux

- me voici de nouveau seule jusqu’à ce seuil…

Comme les nids cachés dans le feuillage

les désirs fragiles qui élongent les mains de l’été

sont restés près des cimes sans connaître d’envol.

Si seulement ils avaient quitté les lumières marines,

le vent qui saisit au collet, le vacarme des routes

qui filent au bord du rivage…

Mais nous restons ici comme les radios

que l’on n’a pas éteintes, oubliées dans la nuit,

comme les enseignes dont quelques lampes sont mortes

mais qui s’efforcent encore de briller.

 

Traduit de l’italien par Jean – Baptiste Para

Revue « Europe, N° 949, Mai 2008 »

 

La coinquilina scalza

E se non fosse il freddo delle sere

a stringerci le labbra,

ma il passo che riprende si rinnova

ha un altro vento

e lutti quelli che ho creduto ?

Lo sai che ho ancora addosso quella voglia

di andarmene  come finisce un film

a sole in faccia nella musica che sale,

lasciare ai vostri angoli di sabbia

ai vostri viali di calma perfetta

ogni furore.

*

Da piccola sbattevo le porte…

Quando sono diventata una che resta

seduta, che svuota le estati

a guardare la stanza dal balcone

per vedere se rientrando

neanche l’ultimo fantasma se n’è andato ?

Ho un nuovo cane che dorme di fianco,

ma tornado le stesse sere lunghe

le porte che sbattono addosso

senza la scossa accesa del fragore…

Bisogna avere la natura di chi resta

per sape tenere gli occchi sugli addii

che durano di più a farli da soli.

*

In ogni corsa, ogni impennata della vita

mi sei mancato e mi manchi per anni.

Nell’uscire verso il bar delle mattine

tutte le mattine uguali dell’inverno

cercarti, come un gioco per sperare…

Ad ogni cambio di stagione, ad ogni svolta

degli occhi e dell’età non ti ho più perso…

Ti tengo per l’estate quando salgo

nei miei golfi di buio e quando torno

di notte verso casa e fino a quando

non passo il punto esatto in cui le ruote

incrociano le mie con le tue strade,

finché c’é ancora modo di incontrarti

non è finito il giorno.

*

Una stagione d’aria

Rimango nel disordine, l’estate

ritorna con le sue mattine sole.

Se tu mi avessi persa per la strada

come capita alle cose più importanti

quando cadono per sbaglio dalle tasche

o ancora peggio vengono rubate,

sarebbe stato meglio che restarti

in salvo su un ripiano che si riempie

che cresce con il muccchio delle ore.

Mi muovo attorno a te come la polvere

e non mi hai mai sentito camminare.

*

E’ da tutta la vita che ti guardo

come quelli che si fissano sull’acqua

che giocano le dita sulle fiamme.

Tu sei quella memoria che si tocca

il senso dell’erba sotto i piedi,

il freddo della sabbia tra le mani.

La tua voce che col vento non si spegne

raggiunge tutti gli angoli del buio.

Ognuno ha la sua star che riempie il cielo…

guarda a un passo tra il prato e la luce,

sono la fan che stringe la ringhiera

per non cadere nel vuolto degli anni.

*

Sono preda dei giorni che verranno

dei volti che non torneranno più

ogni volta che il redere si spegne.

Cosa sarà di noi… di tutti i fuochi…

e di questo pregare in una piogga

tremenda, da far stringere le mani,

che chiuda e apra finestre estate inverni

e lutte le mie case, i miei balconi.

Che ci cadano addosso mille sere

come negli anni, una dentro l’altra…

Si muore un po’ per vivere più forte

se il tempo deve farsi un tempo solo

tutto pieno come un sasso che va a fondo.

*

Tutti i miei anni identici li lascio

in fila nei cortili e sui balconi

come i giocattoli che a fine pomeriggio

rimangono per prendersi la notte,

e passano i mattini ad asciugare

e perdonno colore a poco a poco.

Ogni volta che mi fermo faccio casa

in ogni casa faccioi i miei cortili

di roba abbandonata che rimane.

Ma forse si puo vivere soltanto

in queste due nature senza pace

chi in ogni cosa abita e chi passa

da sempre, chi fa il vento e chi fa il muro.

*

Chi perde il tempo di essere felice

per prima cosa perde le risate

che tolgono il respiro, poi qualcuno

scende dentro lo sguardo lo fa nero

come l’argento chiuso nei cassetti.

Sempre la stessa està lo stesso giorno…

Chi perde il tempo di essere felice

ha l’aria di una casa stagionale

che si prepara a vivere e riempirsi,

tutta la fronte chiusa dentro un lampo

che non si compie mai nel temporale.

*

Il cane che ai miei piedi guarda l’alba

si prende il mio calore e chiude gli occhi.

Di nuovo sola fino a questa soglia…

I desideri fragili che allungano

le mani dell’estate sono ancora

nascoti come i nidi tra le foglie

sono rimasti in alto e senza voli.

Via dale luci d’acqua e dai frastuoni

delle strade che filano sul mare,

via dall’aria che prende alla schiena…

Ma noi restiamo qui come le radio

dimenticate accese in piena notte,

come le insigne che hanno perso qualche luce

ma cercano lo stesso di brillare.

 

La coinquilina scalza,

La Vita Felice editore, Milano (Italia), 2004

 

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